QUINTET EST/OUEST

INTERVIEW 2004
(dans « Le Pétard déchaîné »)



P.D. : Hervé CZAK, pourquoi cette relation Est/Ouest ?

H.C. : « Fils et petit-fils d’immigrés polonais en France, j’ai vécu dans ma famille avec émotion la séparation de l’Europe en deux blocs et la difficulté de communication entre ces deux parties. Créer un groupe, il y a 10 ans, réunissant ces deux parties, c’était, à ma façon, apporter une pierre à l’histoire en cours. »

P.D. : le jazz polonais est cependant peu connu en Europe de l’Ouest !

H.C. : « C’est évident ! Depuis l’entre deux-guerres existe en Pologne un courant jazz très vivace. Quelques noms sont parvenus jusqu’ici comme Krzysztof KOMEDA, grâce au cinéma, Zbigniew SEIFERT pour quelques initiés…J’ai personnellement vécu en Pologne en 1983,84 à une période très sévère pour ce pays dirigé alors par un général aux lunettes noires. Le jazz représentait un espace de liberté dans ce pays traumatisé. J’ai été frappé par la vitalité et le niveau des musiciens. »

P.D. : Y a-t-il un public ?

H.C. : « Bien sûr et quel public, les oreilles grande ouvertes ! J’ai été invité à jouer en Pologne dès la chute du mur de Berlin et y suis allé plusieurs fois avec le pianiste d’origine bulgare Mario STANTCHEV et le pianiste danois Asger SIIGER. C’est au cours d’une tournée en 1993 avec Asger Siiger que nous avons joué en quartet avec le saxophoniste polonais Piotr BARON. C’est ainsi qu’est né le groupe, la rencontre musicale était évidente.Piotr faisait preuve pour un jeune saxophoniste d’une grande maturité. Son langage, clair articulé, sans ratures apportait la couleur que demandait le trio.

P.D. : Vous avez eu envie de vous revoir ?

H.C. : «L’occasion nous en fut donnée en 1995 car nous avons été programmés en France au festival de Radio-France à Montpellier.Piotr est arrrivé avec son ami Piotr WOJTASIK, trompettiste éblouissant. Depuis, il n’a plus été question de jouer sans lui. Le quintet est né à ce moment.

P.D. : Le quintet s’appelait alors P.C.W. ?

H.C. : «Du nom des trois villes d’origine des musiciens : Paris pour le batteur et le contrebassiste, Copenhague pour le pianiste et Wroclaw pour les deux musiciens polonais.

P.D. : Quel a été ensuite le destin de « P.C.W. » ?

H.C. : « Comme dans tous les groupes ou familles, des relations privilégiées se créent, perdurent et nous poussent à nous retrouver pour jouer ensemble. Le jeune pianiste polonais Leslaw MOZDZER remplace Asger et se joint à nous pendant plusieurs années : brillante technique et articulation pianistique phénoménale, des oreilles énormes et une présence intense…Avec lui le groupe devient une relation musicale franco-polonaise …East&West Connection.

P.D. :Comment qualifier le quintet Est/Ouest aujourd’hui ?

H.C. : « Réunir régulièrement pendant une décade des musiciens qui habitent aux deux extrémités de l’Europe n’est pas chose facile et je pense que le meilleur liant musical du groupe est l’amitié. Musicalement, ce groupe a une couleur unique déterminée par l’alliage de sonorité des deux cuivres et de la rythmique. Il faut une entente parfaite et une bonne connaissance mutuelle pour doser ce rapport subtil qui détermine le son d’un groupe. L’enthousiasme, la « pêche », la générosité des solistes font le reste et le public nous réserve un accueil chaleureux. Le hasard des tournées, des disponibilités et des rencontres nous ont fait accueillir beaucoup de musiciens dans le groupe sous le signe de la convivialité : les batteurs Patrick LEMOAL, J. Claude JOUY, les pianistes Benoit DEMESMAY, Ronnie PATTERSON, les saxophonistes Tomasz SZUKALSKI, Maciej SIKALA, Lionel BELMONDO, le trompettiste Stéphane BELMONDO et le guitariste Jérôme BARDE. C’est aussi cela l’esprit du quintet : une rencontre Est-ouest.Pour l’année 2004, le siège du pianiste est occupé par Emmanuel DUPREY, jeune pianiste originaire de Caen et habitué des nuits parisiennes qui est aussi le benjamin du groupe.Il a su trouver la couleur, la dynamique, la liberté qui nous conviennent


¬Interview imaginaire réalisée à Patrimonio (Haute-Corse) le 8 sept 2004¬